Recruter à distance
Posté le 11 décembre 2020Qui dit télétravail dit aussi gestion à distance du recrutement avec de nombreuses questions juridico-pratiques
La convention collective de travail (CCT) 38 fixe le cadre légal en matière de recrutement et de sélection de travailleurs et s'applique même au recrutement à distance. Mais il faut aussi tenir compte de la législation sur la vie privée ou l'emploi des langues, ou du droit civil pour la signature des contrats à distances.
Primo, la CCT prévoit que l'employeur fournisse aux candidats des informations suffisantes sur l'emploi offert, notamment le lieu où la fonction doit être exercée. Dans les circonstances actuelles, il faut être clair quant au télétravail demandé suite à la crise sanitaire (voire dans les cas autorisés pour le travail en entreprise), si l'on souhaite que le travailleur soit présent physiquement (ou pas) dans l'entreprise, dans quelle proportion du temps de travail, etc. Idéalement, le contrat fixera le lieu de travail habituel, sachant que tant que le télétravail est obligatoire, l'arrêté ministériel l'emporte.
L'interview
Secundo, la vie privée du candidat doit être respectée. Ce qui implique une attention particulière si le recrutement s'opère à distance. A priori, rien n'interdit d'enregistrer l'interview vidéo, sous réserve du respect de la vie privée. Mais il est préférable de demander le consentement du candidat. Si des informations confidentielles sont communiquées, il faut être prudent car ce dernier peut lui aussi enregistrer ou effectuer des saisies d'écran. Dans les cas sensibles, on lui fera signer un engagement de confidentialité.
Tertio, la multiplication des intervenants, le stockage d'e-mails, de rapports, commentaires et C.V. sur différents ordinateurs rend le respect du GDPR (Règlement général sur la protection des données) plus compliqué, vu l'obligation de mise à jour des données et de conservation pendant une durée raisonnable (un an pour un C.V., selon la Commission nationale de l'informatique et de libertés, en France). On demandera de préférence aux participants, internes et externes, de tout effacer dès la fin du recrutement, pour ne conserver une copie que sur un site.
Quatrièmement, le respect de la législation sur l'emploi des langues s'impose.
La récolte d'informations
A défaut de rencontre personnelle, les recruteurs cherchent naturellement à collecter davantage de références sur un candidat, examinant sans doute plus de sources en ligne. En soi, rien ne l'interdit et aucun consentement s'est requis si la vie privée du candidat est respectée. Donc si l'investigation est uniquement liée à l'évaluation de sa candidature eu égard aux besoins de la fonction, si elle reste proportionnée et si elle est effectuée par le truchement de sources publiques.
Pour rappel, les dispositions légales régissent le recours à un détective privé.
En théorie, un contrat de travail peut être conclu oralement. Un écrit n'est donc pas obligatoire, sauf pour un contrat à durée déterminée, à temps partiel, etc... ou de télétravail. On peut alors envisager un contrat électronique (avec ses contraintes) ou, plus simplement, un échange de contrats signés et scannées ou comportant une signature scannée. Au pire, ils vaudront à titre de début de preuve et l'article 1322 du code civil pourra être évoqué en l'absence de contestation. Pour les contrats à durée déterminée et temps partiels, l'approche la plus sûre reste la signature papier, avant ou au moment de l'engagement.
Enfin, en cas de profilage automatisé, aucune décision ne peut être basée exclusivement sur un traitement automatisé des données personnelles pour évaluer le rendement, le comportement ou les préférences, sans que le sujet n'en soit informé et ne puisse s'y opposer ou exiger d'être entendu.