Impôts sur les salaires numéro un, plans cafétéria et politiques de rémunération « flexibles » mal inspirées, primes à la voiture et à la mobilité, tax rulings dénoncés... Lorsque le refus de reconnaître le problème conduit à une impasse...
Posté le 12 novembre 2018Il faut voir ces politiciens, ces juristes, ces spécialistes en « rémunération et avantages » si heureux de nous vendre le cash-for-cars, les primes mobilité, les plans cafétéria, la rémunération « en points » comme LA solution qui fera plaisir à tout le monde.
La dure réalité est révélée par Eurostat et l'OCDE. D'abord, la Belgique est en deuxième position parmi les pays qui taxent le plus, et ensuite, elle est en première position pour la taxation des revenus du travail (cotisations sociales et impôts combinés). Cela malgré la réforme fiscale...
Alors que, en même temps, l'administration fiscale belge remet en question les rulings fiscaux concernant les stock-options ou les plans cafétéria (BNP Paribas est actuellement en pleine discussion concernant son système de rémunération). À tel point qu'un départ du ministre des Finances a été nécessaire.
Si la Belgique est aujourd'hui le paradis des rémunérations alternatives, c'est bien parce que la rémunération y est trop lourdement taxée. Et ce, depuis longtemps...
Les plans cafétéria et autres systèmes de rémunération « en points » ou « flexibles » sont à la mode. Ceux qui prétendent permettre aux travailleurs de choisir, selon leurs besoins de vie, entre divers avantages « moins taxés » tels que la voiture de société, le plan d'assurance groupe, les stock-options ou warrants, les allocations familiales supplémentaires, les jours de congé supplémentaires, les services de petites tâches, etc. Pourtant, il ne s'agit en réalité que d'une hypocrisie qui masque un déplacement constant et qui accélère la transformation des rémunérations en cash — fortement taxées — vers « autre chose ».
Je le dis, les travailleurs — s'ils avaient le choix — préfèreraient avoir de l'argent liquide dans leur poche avec la liberté d'en faire ce qu'ils veulent, quand ils veulent, plutôt que d'opter pour des formules préétablies, des paniers d'avantages censés être dans leur intérêt.
Toutes ces formules ne font que restreindre la liberté de l'employé de disposer librement de son salaire. Et ce, car ce salaire est tellement taxé que chacun en Belgique cherche désespérément un moyen d'améliorer son pouvoir d'achat, même en acceptant une telle intervention.
Pire encore, avec le cash-for-cars ou les primes mobilité, on parvient à traiter fictivement la rémunération en cash de manière plus avantageuse en lui collant une autre étiquette, avec toutes les questions et difficultés que cela soulève. On en viendrait à ne plus savoir ce qui est du cash et ce qui ne l'est pas, et on ouvre la voie aux abus.
Et ce que l'on donne d'une main, on essaie de le reprendre de l'autre avec des rulings qu'on dénonce secrètement (témoignant d'une véritable guerre interne au sein des fiscaux), avec des conditions — je pense à la prime CAO 90 par exemple — qui deviennent plus strictes année après année, avec des conditions inventées (je pense à la limite de 20% pour l'octroi de stock-options qui n'a aucune base légale), etc.
Nous sommes, je pense, aux limites du système lorsque la sécurité juridique devient aléatoire, que la liberté des travailleurs est comprimée, que les recettes budgétaires deviennent incertaines et que les employeurs sont poussés dans une course en avant pour optimiser les rémunérations.
Discussions étranges avec un spécialiste des plans cafétéria, qui reconnaît effectivement l'atteinte à la liberté de disposer librement de son salaire, mais qui vante l'outil de la modification des comportements que l'État peut utiliser pour encourager ceux-ci à prendre une voiture plus petite et plus écologique (afin de fournir une solution à l'immobilisme du gouvernement face aux voitures de société, qui sont un cauchemar écologique mais le soupape de sécurité du système de rémunération en Belgique), à épargner pour leur pension (afin de résoudre les limites de la pension légale), à souscrire une assurance-vie (afin de résoudre les limites de la sécurité sociale), à obtenir une aide pour les frais de garde d'enfants (afin de résoudre les problèmes liés à la politique de natalité), etc.…
Chaque travail mérite un salaire. Il faudrait ajouter que chaque travail mérite un salaire raisonnablement taxé. Cela éviterait cette surenchère de créativité en matière de rémunérations alternatives qui, au final, profite uniquement aux spécialistes du secteur.