Tout le monde sur le pont comment les entreprises peuvent-elles survivre au coronavirus ?
Posté le 17 mars 2020Les fournisseurs ne peuvent pas honorer les contrats, les salons professionnels sont annulés, les employés veulent travailler à domicile et vous n'aurez qu'un produit avec « corona » dans le nom. Les entreprises doivent mettre la main à la pâte. Des entrepreneurs témoignent de la manière dont ils résolvent ces huit problèmes urgents.
Le télétravail est-il la solution miracle ?
Pour aider à lutter contre la propagation du coronavirus, de nombreuses entreprises commencent à mettre en place le télétravail. Les entreprises qui le faisaient déjà, comme Deloitte Belgique, ont un avantage en termes de préparation.
Selon nos informations, aucune entreprise n’a inclus dans son règlement de travail que ses employés peuvent télétravailler en cas d’épidémie. Cela signifie qu’il n’existe pas de cadre législatif clair. Par conséquent, les entreprises ne peuvent pas imposer unilatéralement le télétravail à tous leurs employés. Les entreprises qui offrent déjà la possibilité de télétravailler ont donc une longueur d'avance sur celles qui commencent seulement maintenant. Pour mettre en place le télétravail, les entreprises doivent ajuster leur règlement de travail. Cela implique une concertation avec les représentants syndicaux dans l’entreprise. Cela prend un certain temps.
Le cabinet de conseil Deloitte Belgique a introduit le télétravail il y a plusieurs années. « La flexibilité fait partie de notre culture d'entreprise », explique Inge Diels, talent partner chez Deloitte Belgique. Il n’existe pas de règle générale pour l’ensemble de l’entreprise, mais chaque cas est discuté individuellement entre l’employé et son supérieur. « Nous essayons de nous adapter aux besoins de nos salariés, notamment aux nouvelles générations, qui souhaitent plus de flexibilité. Mais nous devons aussi garantir la continuité de notre activité », ajoute Inge Diels.
Selon un récent sondage réalisé par Voka-Kamer van Koophandel auprès de 1500 entreprises flamandes ces derniers jours, il ressort qu’il est impossible pour un tiers des entreprises de permettre à tous leurs employés de travailler à domicile. Le télétravail est une forme de travail à distance, ce qui signifie que la personne travaille en dehors du lieu de l’entreprise. Cela peut être à domicile, mais ce n’est pas nécessairement le cas.
Il n'est pas nécessaire de surveiller constamment les employés.
Le télétravail n'est donc pas une solution miracle, surtout dans des secteurs comme l'industrie ou le commerce. De plus, certains employés hésitent à introduire le télétravail. Ils craignent que cela n'incite moins leurs collaborateurs à travailler et que cela nuise à la productivité. Le télétravailleur ne passera-t-il pas toute la journée à regarder une série télévisée au lieu de travailler ? Comment savoir à distance si le travail est effectué ?
Il faut gérer en fonction des objectifs, indique Benoît van Grieken, conseiller en partenariats chez le fournisseur de services RH SD Worx : « Il est important de vérifier si l’employé a accompli ses tâches, mais il ne faut pas constamment surveiller ses moindres faits et gestes. »
Van Grieken conseille aux entreprises de fournir à leurs employés des outils numériques pour accomplir leur travail : « Un agenda électronique partagé avec des contacts, des actions et des dossiers traités permet de savoir sur quoi travaille l'employé, que ce soit au bureau ou à domicile. »
Les réunions virtuelles sont-elles aussi efficaces que les réunions classiques ?
Les installations pour les vidéoconférences prenaient la poussière dans de nombreuses entreprises, mais avec les conseils d’éviter autant que possible les contacts physiques, leur utilisation a considérablement augmenté.
L’entreprise de télécommunications Orange a transformé autant que possible ses réunions en extérieur en réunions via vidéoconférence. Vous restez alors au bureau et tenez la réunion via une connexion vidéo avec des personnes situées ailleurs. Cette mesure a été mise en place au niveau du groupe. Elle s'applique à tous les pays où l'entreprise est active. Pour l’opérateur, c’est l’un des principaux leviers pour freiner l’épidémie. La plupart des autres grandes entreprises ont pris des recommandations similaires.
La technologie des vidéoconférences a fait des progrès considérables ces dernières années, en suivant les évolutions des télécommunications. Par exemple, les gens se sont habitués à des applications comme FaceTime, le programme d’Apple pour les appels vidéo. La vidéoconférence s’adapte à ces évolutions, explique Yashfeen Saiyid, responsable des produits avancés pour l’espace de travail chez Proximus. L’entreprise de télécommunications propose une gamme variée. Pour une réunion interne avec deux personnes, une simple application suffit, tandis que pour des réunions avec une douzaine de participants répartis sur plusieurs sites, il faut une installation avec caméras, micros et télévisions.
Alexandre de Saedeleer, directeur général de l’agence digitale Tapptic, a déjà participé à une conférence téléphonique de six heures avec les États-Unis, à laquelle ont pris part dix-sept personnes. « Pour que cela se passe efficacement, nous avons mis en place des outils comme une fonction de chat, afin d'éviter que les gens ne se coupent la parole tout le temps », explique De Saedeleer. « Nous conseillons également à nos clients d'acquérir certains logiciels ou équipements pour que les vidéoconférences ne soient pas gênantes. »
Le contact humain reste indispensable, mais les entreprises feront de plus en plus appel aux vidéoconférences.
L’agence digitale Tapptic permet désormais à ses employés de travailler à domicile deux jours sur trois et utilise des plateformes collaboratives telles que Slack, Google Drive, Microsoft Team et Zoom. Ces outils permettent aux collègues de collaborer en ligne à distance. Slack, par exemple, qui annonce 12 millions d'utilisateurs quotidiens, a vu son action augmenter de 25 % en un mois.
Les dernières technologies de vidéoconférence sont devenues beaucoup plus conviviales. Les participants à la réunion peuvent échanger des messages via un système intégré, partager des documents et les modifier ensemble. Lors de réunions avec des participants étrangers, la reconnaissance vocale permet désormais à la technologie de générer automatiquement des sous-titres. Certains systèmes permettent d’enregistrer la réunion et de noter automatiquement tout ce qui a été dit.
La PME belge AlloCloud offre désormais gratuitement sa plateforme de réunions web à ses clients. De grandes entreprises comme Google et Cisco ont levé les limites sur leurs versions gratuites de vidéoconférences. L’entreprise chinoise Zoom, dont l’action a augmenté de 40 % en quelques semaines, a supprimé la limite de durée pour les réunions virtuelles à deux personnes. Désormais, vous pouvez tenir des réunions virtuelles de plus de quarante minutes.
Les réunions classiques disparaîtront-elles pour autant ? « Le contact humain reste indispensable, mais les entreprises feront de plus en plus appel aux vidéoconférences », explique Yashfeen Saiyid de Proximus. « Ce qui se passe actuellement montre que les entreprises doivent continuer à investir dans des outils pour garantir la continuité de leur activité et permettre à leurs équipes de collaborer plus facilement. Si les entreprises ne développent pas leurs propres outils, leurs employés auront recours à des applications de messagerie grand public, comme WhatsApp, pour leurs contacts professionnels. »
Comment protéger mon personnel ?
Les entreprises prennent des mesures pour améliorer l'hygiène et réduire les déplacements et les réunions. Elles le font pour protéger leur personnel, mais cela relève également d'une obligation légale, affirme l'avocat Christophe Delmarcelle.
Que ce soit pour 10 ou 5000 employés, les entreprises doivent veiller au bien-être, à la santé et à la sécurité de leur personnel. Alors que le nouveau coronavirus se propage dans notre pays, les entreprises doivent prendre des mesures préventives. "La loi du 4 août 1996 et le code du bien-être au travail stipulent que l'employeur a de lourdes obligations en matière de prévention et d'analyse des risques", avertit Christophe Delmarcelle, avocat associé au cabinet DKW et spécialisé en droit social. "Celui qui ne respecte pas ces règles peut être poursuivi pénalement ou civilement responsable."
La majorité des entreprises a donc déjà pris des mesures. Des directives claires sur le lavage des mains à la mise à disposition de gels alcoolisés, en passant par des mesures spécifiques pour l'hygiène. "Engie nettoie plus fréquemment les espaces communs, les coins café, les poignées de porte et les boutons d'ascenseur", explique Anne-Sophie Hugé, porte-parole d'Engie Belgique. "Nous avons également adapté la climatisation de nos bâtiments pour qu'elle fonctionne avec de l'air frais et non de l'air ambiant." C'est un exemple de mesure que la plupart des entreprises peuvent facilement mettre en place. Engie, comme la plupart des entreprises, a également fortement limité les déplacements professionnels vers les zones à risque - pas seulement la Chine ou l'Italie, mais aussi la France.
Un employeur ne peut pas obliger un salarié à prendre sa température.
Que faire si quelqu'un veut malgré tout venir travailler ? L'employeur peut lui interdire l'accès à son lieu de travail en cas de soupçon ou de certains signes", déclare l'avocat Christophe Delmarcelle. "Mais un tel refus peut entraîner la rupture du contrat de travail, même avec maintien du salaire. Il est donc préférable de s'entendre avec les employés sur le travail qu'ils peuvent faire de chez eux ou s'ils doivent rester en quarantaine payée."
Delmarcelle souligne également que tout n'est pas permis pour protéger les employés. "En vertu de la loi du 23 janvier 2003, l'employeur ne peut pas imposer un examen médical, sauf pour les fonctions de sécurité ou de surveillance. Dans tous les cas, seul le conseiller en prévention ou le médecin du travail est habilité à effectuer cet examen. Un employeur ne peut donc pas obliger un salarié à prendre sa température avant de revenir au travail. Il peut cependant lui demander s'il veut prendre sa température lui-même ou demander au conseiller en prévention de lui en faire la demande si ce dernier le juge nécessaire. Il est aussi utile de rappeler aux employés qu'ils ne doivent rien faire qui mette en danger leurs collègues, leur employeur ou des tiers."
Comment puis-je trouver de nouveaux clients pendant une épidémie ?
Tokyo, Singapour, Barcelone, Bologne, Hanovre, une foire après l'autre est annulée. Le temps et l'argent que les entreprises économisent grâce à l'annulation des foires peuvent être consacrés à leurs campagnes de marketing numérique.
Lasea, un fabricant de micromachines laser, tente de transformer la crise du coronavirus en une opportunité. "Nous avons commencé à faire du marketing numérique il y a deux à trois ans, et c'est maintenant le moment de monter d'un niveau", explique Violette Marbehant, responsable des ventes et du marketing de la PME liégeoise Lasea. "Nous allons améliorer notre optimisation pour les moteurs de recherche sur Google et augmenter nos campagnes payantes. Nous verrons ensuite quels résultats cela donnera."
Les foires elles-mêmes se lancent également dans le numérique. Bio Spring Europe devait réunir fin mars les leaders du secteur pharmaceutique et biotechnologique à Paris, mais cela ne va pas avoir lieu. Ou peut-être que si ? Les organisateurs ont annoncé qu'ils organiseraient "le plus grand événement numérique au monde dans les sciences de la vie". De telles foires numériques existaient déjà en complément des événements classiques.
En plus de la numérisation, Lasea essaie également de trouver des clients dans de nouveaux secteurs. La PME, qui emploie 80 personnes et réalise un chiffre d'affaires de 12 millions d'euros, est actuellement fortement dépendante des horlogers suisses. "Nous ressentons déjà un retard depuis les problèmes politiques à Hong Kong, le principal marché d'exportation des montres de luxe suisses", explique Jean-Christophe Wauters, responsable des ventes et du marketing chez Lasea. "Même si 60 % des coûts de production doivent être générés en Suisse, le reste des coûts est réalisé un peu partout, notamment en Chine. Si un fournisseur connaît des pénuries, l'horloger ne pourra plus assembler ses montres. Nous avons déjà ressenti un ralentissement des investissements. Heureusement, nous avons décidé plus tôt de diversifier nos activités. Nous nous concentrons principalement sur la microélectronique dans le secteur médical. La crise actuelle nous confirme que c'était un bon choix."
Comment maintenir la logistique de l'exportation en marche ?
Mydibel, une PME spécialisée dans le développement, la production et la commercialisation de produits à base de pommes de terre, exporte 55 % de sa production en dehors de l'UE.
L'entreprise familiale utilise le transport maritime, en recourant à des conteneurs réfrigérés, appelés reefers. "Sur un bateau, environ 15 % de l'espace est réservé aux produits surgelés", explique Marc Van Herreweghe, le PDG de Mydibel. "Quand de nombreux bateaux sont bloqués dans les ports de Chine et d'autres pays, il devient difficile de trouver des navires pour expédier nos produits. Le coronavirus est déjà le deuxième problème, après la peste porcine africaine, qui a également fortement perturbé le transport maritime."
Il s'agit d'anticiper ce qui va arriver.
Les alternatives ne sont pas évidentes. L'avion coûte trop cher et de nouvelles routes maritimes ne s'ouvrent pas si facilement. "On s'en sort, mais cela nous coûte de l'argent", indique le PDG de l'entreprise de Mouscron. "Dans un mois ou deux, on verra si nous devons ralentir la production. Pour une entreprise comme la nôtre, je pense qu'on pourra parler de retard, mais pas de perte de produits vendus."
Van Herreweghe prend cela avec philosophie. "C'est le travail d'un manager de résoudre les problèmes qui surgissent soudainement", explique-t-il. Il faut aussi anticiper ce qui va arriver. C'est pourquoi le PDG examine attentivement des routes alternatives pour expédier ses produits à base de pommes de terre vers l'Asie. Mydibel exporte ses produits vers 120 pays, mais pas vers la Chine. L'entreprise a réalisé un chiffre d'affaires de 250 millions d'euros l'année dernière et construit une nouvelle usine, qui devrait ouvrir cette année. Dans ce nouveau bâtiment, l'effectif pourra passer de 650 à 725 personnes.
Comment compléter mes stocks maintenant que la production en Chine est paralysée ?
L'épidémie de coronavirus met à l'épreuve la chaîne logistique de production, qui est devenue courante au cours des vingt dernières années. De nombreuses entreprises devront probablement constituer des stocks plus importants à l'avenir.
"Les entreprises devront réfléchir aux coûts associés à des stocks plus importants", indique Mikael Petitjean, professeur de finance à la Louvain School of Management et économiste en chef de Waterloo Asset Management. "Les entreprises réfléchiront sans doute à la manière de budgétiser un stock plus important. Ce n'est pas une bonne nouvelle, car des stocks plus importants signifient plus d'argent immobilisé. Cela coûte cher et a un impact sur l'évaluation de l'entreprise. De plus, il y a un risque que les stocks perdent de la valeur si la technologie évolue entre-temps ou si la demande change."
Nous ressentons le stress croissant des entreprises qui nous approvisionnent.
Le groupe technologique lié à l'image de Liège, EVS, adopte une approche prudente. "Nous suivons de près la situation de nos fournisseurs", indique Yvan Absil, le PDG d'EVS. "Nous avons dû faire face à la fermeture d'une usine en Chine, mais celle-ci a depuis redémarré. Nous ressentons le stress croissant des entreprises qui nous approvisionnent. Leurs stocks diminuent et les retards de livraison augmentent. Environ 20 % des livraisons arrivent en retard, pas toujours en raison du coronavirus. Cela n'a pas encore eu de conséquences pour nous. Nous pouvons continuer à livrer nos produits, car nous avons suffisamment de stock jusqu'à la moitié de l'année."
Yvan Absil explique qu'EVS a toujours cherché à équilibrer les avantages des livraisons justes-à-temps et ceux des commandes suffisamment grandes pour obtenir des réductions. "Nous examinons maintenant quel stock supplémentaire nous avons besoin pour garantir les livraisons au second semestre, si les problèmes persistent", ajoute Absil. EVS a déjà passé des commandes auprès des usines chinoises rouvertes plus tôt que prévu et diversifie ses fournisseurs. Absil note toutefois que cette diversification n'est pas une solution miracle. Les différents fournisseurs achètent souvent eux-mêmes des composants auprès d'une même entreprise.
Cette diversification n'est d'ailleurs pas à la portée de toutes les entreprises, comme le montre le témoignage de Philippe Bolle, le PDG de Skylane Optics. Cette entreprise technologique est spécialisée dans les transceivers, qui convertissent le signal lumineux entre la fibre optique et les commutateurs de réseau. "Dans notre domaine, tout le monde se fournit en Chine et nous ressentons tous l'impact", déclare Bolle. "Notre production est aujourd'hui retardée. En raison du coronavirus, de nombreuses entreprises (en Chine, ndlr) ont été mises en quarantaine pendant un mois. Certaines entreprises sont encore fermées et une grande partie des usines qui redémarrent fonctionnent à seulement 10 ou 20 % de leur capacité. Ce qui complique encore les choses, c'est que je ne pourrai peut-être pas livrer mes propres clients, car ils seront peut-être aussi en quarantaine."
Même si Skylane Optics trouve d'autres fournisseurs, cela ne garantit pas une coopération immédiate. "Nos produits sont authentifiés et certifiés", explique Philippe Bolle. "Nos contrats avec les opérateurs de télécommunications stipulent que nous leur fournissons un matériel très spécifique d'un fournisseur particulier. Nous ne pouvons pas simplement changer cela. Nous pourrions augmenter nos stocks, mais cela ne résout toujours pas le problème de fond. Nous serons toujours dépendants de la Chine."
Le PDG de la PME namuroise rêve donc de ramener certaines lignes de production en Europe. "Mais malheureusement, il n'y a pas d'investisseurs prêts à prendre ce risque", se désole Bolle. "D'autres secteurs à haut risque, comme la biotechnologie, ont reçu d'énormes fonds publics. Ce n'est pas le cas dans le secteur des télécommunications."
Comment un marque peut-elle maintenir la confiance de ses clients ?
Que peuvent faire les marques, en particulier celles qui ont "corona" dans leur nom, pour rassurer leurs clients ? L'humour n'est que rarement la meilleure solution, surtout lorsque des vies sont perdues.
Lorsque la marque de bière Corona a décidé il y a trois semaines de faire une campagne humoristique pour présenter sa nouvelle gamme, des réactions indignant rapidement sont apparues sur les réseaux sociaux. Le coronavirus faisait encore principalement rage en Chine et non aux États-Unis à ce moment-là. La marque a eu la mauvaise idée de faire allusion à l'arrivée imminente du virus, avec le slogan Coming ashore soon (bientôt à terre) et une photo des canettes sur une plage.
Le buzz négatif que la marque mexicaine a ainsi créé s'est rapidement fait ressentir. L'action de son producteur, Constellation Brands, appartenant au groupe brassicole AB Inbev, a perdu 10 % de sa valeur boursière en une semaine. Selon des enquêtes menées auprès du public américain, la réputation de la marque a également chuté. Depuis, la marque adopte une approche beaucoup plus discrète.
"Les entreprises dont le nom ressemble phonétiquement à 'corona' doivent tout laisser passer", explique Emmanuel Goedseels, co-fondateur de Whyte Corporate Affairs, une agence de communication spécialisée dans la gestion de crise. "Une telle marque doit être très prudente avec les slogans publicitaires qu'elle utilise, mais elle ne doit pas non plus se faire oublier complètement. Il s'agit de trouver le juste équilibre entre relativiser et business as usual d'un côté et trop communiquer et mettre la marque sous pression de l'autre."
La compagnie d'assurances belge Corona Direct a trouvé cet équilibre. Elle n'a pas suspendu sa campagne publicitaire en cours, explique Ulrike Pommée, porte-parole de Belfius, propriétaire de Corona Direct. "Je suis convaincue que 99 % des gens font la différence entre un virus et une marque qu'ils connaissent bien", déclare Ulrike Pommée. "Nous avons donc décidé de continuer la campagne, d'autant plus que la crise actuelle n'affecte pas les résultats. Nous devons éviter la panique et continuer nos activités."
Les entreprises dont le nom ressemble phonétiquement à 'corona' doivent tout laisser passer.
Il est ironique que les affiches dans les abribus pour Corona Direct utilisent le slogan 'Pour tout le monde !'. Pourtant, il semble que la marque ne soit pas remise en cause sur les réseaux sociaux. Quelle est la différence avec la marque de bière Corona ? "Il ne s'agit pas tant de la communication elle-même, mais du produit", explique Thierry Bouckaert, directeur général de l'agence de communication Akkanto. "Il faut vraiment faire la différence entre les deux produits. Selon moi, Corona Direct souffre beaucoup moins de la situation, car un produit d'assurance est beaucoup moins impulsivement acheté que de la nourriture. On ne souscrit pas à une assurance tous les jours. De plus, une assurance est beaucoup moins tangible qu'une bière vendue en supermarché et que l'on porte à sa bouche pour la boire. Cela joue aussi un rôle."
Il y a deux semaines, un franchisé de Shop & Go, une marque de Delhaize, a également lancé une promotion humoristique de son propre chef, avec l'offre 'deux Corona achetées, une Mort subite offerte'. L'action a rapidement été relayée sur les réseaux sociaux, mais Delhaize a demandé au franchisé d'Ixelles de retirer sa promotion. "Nous comprenons que les gérants de magasin aient souvent envie de communiquer de manière originale avec de bonnes intentions, mais nous ne pouvons pas tout accepter", explique Aude Mayence, responsable marketing chez Delhaize.
Comment éviter les problèmes de liquidité ?
Les livraisons annulées, les chaînes de production à l'arrêt, le personnel à l'écart, au fur et à mesure que les mesures pour endiguer l'épidémie se multiplient, les conséquences pour les entreprises se font de plus en plus sentir. Non seulement le chiffre d'affaires souffre, mais des problèmes de liquidité peuvent également surgir. Lorsque plus personne ne peut acheter ou livrer, une entreprise doit pourtant continuer à payer son personnel. Comment gérer cela ?
"Dans la grande majorité des cas, les entreprises disposent de lignes de crédit inutilisées, qu'elles peuvent maintenant activer, ce qui leur permet de rester maîtres de la situation", explique Pierre Gustin, directeur des entreprises et des administrations chez ING Belgique. Si l'entreprise ne dispose pas de ligne de crédit, elle peut discuter avec son banquier pour obtenir un crédit. "Les conditions sont que le banquier connaisse bien le client, qu'il s'agisse de problèmes ponctuels et temporaires, et que l'entreprise ne soit pas déjà proche de la limite de ce qu'elle peut emprunter", précise Pierre Gustin. Le banquier s'attend à ce que les problèmes soient supportables pendant le premier mois, mais que les entreprises les plus vulnérables rencontreront des difficultés par la suite.
Martine Klutz, responsable stratégie et marketing pour les entreprises et les administrations chez Belfius, propose d'autres alternatives aux lignes de crédit. "Il est connu que la Belgique est une économie ouverte, avec des entreprises tournées vers l'export. En général, j'ai l'impression que le risque de contrepartie (le risque qu'une contrepartie ne puisse pas remplir ses obligations contractuelles, ndlr) est ajusté à la hausse. Cela ne fait pas de différence que ce risque soit lié à un crédit ou à un risque de change."
L'épidémie a une portée beaucoup plus grande que les attentats terroristes.
Quelles questions les clients posent-ils encore à Belfius ? "Ils veulent d'abord savoir comment nous pouvons sécuriser leurs transactions commerciales et comment nous pouvons couvrir les transactions internationales, par exemple via des échanges ou des crédits documentaires (méthode sûre pour garantir des revenus, ndlr)", indique Martine Klutz. En tout cas, ne tardez pas trop à consulter votre banquier, conseille Pierre Gustin : "Il n'y a rien de pire que de devoir appeler votre banquier en urgence pour obtenir 200.000 euros afin de payer les salaires demain." Dans ce cas, vous devriez également vous informer sur quand vos employés reçoivent leur salaire, une allocation de chômage ou rien du tout.
Le gouvernement soutient également les entreprises. Début mars, le gouvernement a déjà annoncé des mesures de soutien pour les entreprises touchées. Le gouvernement facilite ainsi la reconnaissance du chômage temporaire pour cause de force majeure et permet aux entrepreneurs de payer en plusieurs fois leur impôt sur les sociétés, leur précompte professionnel, la TVA ou l'impôt des indépendants. Cela ne concerne toutefois que les entreprises dont les problèmes sont dus au coronavirus. Lundi, l'UE a également annoncé un plan de soutien de 180 milliards d'euros pour soutenir les entreprises. Nous devons tout mettre en œuvre pour éviter la faillite des entreprises, a déclaré le ministre des Finances Alexander De Croo (Open Vld).
Après les attentats terroristes de Zaventem et de la Région bruxelloise, des mesures ont également été prises pour soutenir l'économie. Pourtant, il y a des similitudes et des différences entre ces deux crises, explique Marc Van Muylders, président de Horeca Bruxelles : "Les attentats ont été brutaux et très localisés. Il s'agissait de restaurer la confiance. L'épidémie a une portée beaucoup plus grande, et la confiance ne reviendra que lorsque la crise sera maîtrisée."
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